Le Fonds de pension des organisations qui font partie des Nations unies (ONU) regroupe 200’000 bénéficiaires, dont environ un quart d’actifs. Cette structure emploie 80 collaborateurs à New York et gère 54 milliards de dollars, investis dans près de 40 pays. Le Genevois Ivan Pictet en est le premier président non américain, depuis février dernier. Ex-associé senior de la banque privée qui porte son nom, il préside également la Fondation pour Genève. Entretien.
Le Temps: La présidence du Fonds de pension de l’ONU est-elle une «tâche lourde et technique», comme vous l’avez plusieurs fois expliqué?
Ivan Pictet: Elle est compliquée, car le fonctionnement onusien est un peu byzantin avec ses rapports hiérarchiques. Ceci implique des contacts quasi quotidiens avec l’équipe de gestion à New York et de multiples rencontres avec d’autres acteurs dans le monde entier: au Mexique il y a quinze jours, à Rome cet été et à Tokyo ce printemps.
Comment cette épargne retraite est-elle investie?
En schématisant, une commission d’actuaires planifie l’allocation stratégique des actifs, à savoir la répartition optimale du portefeuille. Et mon conseil de dix financiers indépendants s’occupe des aspects tactiques, soit la répartition des placements sur une période plus courte de deux à trois ans, en fonction de ce que nous percevons de l’évolution des marchés. Mais en fin de compte, c’est toujours le secrétaire général Ban Ki-moon qui décide.
Peut-on encore trouver de la valeur sur les marchés?
Depuis quinze ans, le fonds a réalisé un rendement annuel de plus de 7%, supérieur à l’objectif minimal fixé à 6,5% et basé sur une contribution étatique de 23,7% de la masse salariale.
Ce capital est-il investi de manière éthique?
Oui et non. Nous ne plaçons rien dans le tabac ou l’armement. Mais nous n’avons pas encore l’expertise pour une gestion visant le développement durable. Ce que, d’ailleurs, aucun fonds de pension au monde ne fait, pour ne pas gêner les performances. Toutefois, nous avons dernièrement reçu pour instruction de prendre en considération le phénomène du changement climatique dans nos choix. Notre portefeuille – comprenant 63% d’actions – s’adapte progressivement aux questions environnementales et sociétales.
Le fonds est dénominé en dollars…
Mais les bénéficiaires peuvent toucher leur pension en plusieurs devises. 14% des retraités le font en francs, sans forcément être domiciliés en Suisse. C’est un bon calcul de leur part, car le dollar dans lequel se font plus de 70% des allocations a passablement perdu de sa valeur depuis 40 ans.