imageIl pourrait devenir le fossoyeur de la loi sur la prévoyance professionnelle. Pierre-Yves Maillard dit tout le mal qu’il pense de la copie du parlement et livre sa vision d’un deuxième pilier juste et durable.

Le Temps: Tout le monde s’accorde à dire qu’une réforme de la LPP est nécessaire et urgente. La décision de lancer le référendum a-t-elle été difficile à prendre?
Pierre-Yves Maillard
: C’était une évidence. Le parlement a manifesté un tel mépris du travail fait en amont entre partenaires sociaux. Il n’y avait donc aucune hésitation. Pour la réforme de l’AVS, on savait que les fronts étaient plus figés et que le peuple devrait arbitrer. Mais, pour la LPP, nous sommes partis dans l’esprit du partenariat social puisque le Conseil fédéral nous avait confié ce mandat. Le compromis trouvé avait le soutien de la principale faîtière patronale, l’Union patronale suisse, mais elle ne l’a pas défendu avec assez de force. C’est triste parce que cette opération aura des conséquences lourdes sur le dossier. Et le partenariat social sort très abîmé.

La droite a tout de même tenu parole sur certaines mesures ciblées pour les personnes vulnérables, par exemple la modification de la déduction de coordination. Si vous faites échouer la réforme, elles vont devoir attendre des années pour voir leurs perspectives s’améliorer.
Ces personnes sont justement sacrifiées par la réforme. Elles devront cotiser beaucoup plus et voir leur salaire net drastiquement baisser, souvent sans même pouvoir compenser la baisse de rentes provoquée par la baisse du taux de conversion. Et, pour les personnes à revenu très bas, dans les cas où la rente augmenterait, le revenu global à la retraite resterait inchangé, puisque cette hausse serait compensée par une baisse des prestations complémentaires.

Le parlement a simplement regardé à la dépense avec un projet moins coûteux, 2,1 milliards contre 3,2 milliards pour celui du Conseil fédéral.
Oui, mais cette somme est mal répartie. Ces 2 milliards seront prélevés auprès des gens à petits revenus et des branches à bas salaires. Notre compromis protégeait les rentes et était financé solidairement, aussi par les branches économiquement fortes.

Il faut être clair. On est passé à autre chose. Il s’agit de faire baisser les rentes, affaiblir les deux piliers au profit d’une épargne purement commerciale, à savoir le troisième pilier qui profite à l’industrie financière. Mais bonne chance pour vendre ce projet à la base politique, car il n’y a que 10 ou 15% des gens qui peuvent se payer les cotisations maximales à ce pilier. Les autres n’y arrivent pas.

Il n’y a pas que la population qui passe à la caisse. Beaucoup de PME voient leurs marges s’éroder et n’ont pas envie de subir une augmentation des cotisations.
Le paradoxe, c’est que ce sont elles qui vont payer la facture de la réforme LPP! C’est d’ailleurs pour cela que l’USAM ne s’est pas encore clairement positionnée. Les PME auraient gagné avec notre compromis, car nous serions allés chercher une grande partie de l’argent avec la hausse de cotisation de 0,5% auprès des hauts revenus et des grandes entreprises. Les PME ont besoin de cette contribution de solidarité. Ce n’est pas avec des logiques individualisées qu’on trouvera des solutions pour ce type d’entreprises.

  Le Temps