Pour Veronica Weisser, spécialiste en prévoyance chez UBS, l’AVS crée des incitations erronées en matière de progéniture, le 2e pilier nécessite des réformes et il faut absolument une assurance des soins. Extraits de l’interview avec Le Temps.
Vous avez quarante ans. Or votre activité professionnelle porte sur la prévoyance, devrions-nous toutes et tous nous pencher sur la prévoyance à cet âge déjà? Nous sommes nombreux à penser que tout peut changer d’ici à la retraite.
C’est précisément parce que beaucoup d’éléments peuvent et vont changer que les jeunes gens devraient s’intéresser plus activement à ce sujet. Partir de l’idée que tout ira bien avec sa propre rente parce que ça a marché pour les parents et les grands-parents est hasardeux. Car les défis démographiques sont énormes et ils le sont plus que jamais. Il est donc souhaitable que les jeunes s’occupent plus tôt et plus résolument de leur prévoyance.
A quel âge?
Je recommande à tout un chacun de mettre de côté mensuellement 10 à 15% du salaire dès le début et d’investir ce montant de manière diversifiée dans des actions. Si on le fait et que l’on n’a pas d’interruptions trop importantes dans sa vie professionnelle, on est financièrement préparé au mieux pour les plus longues vacances de l’existence.
L’espérance de vie augmente. Par conséquent, n’est-il pas judicieux d’élever l’âge de la retraite? D’autres Etats européens le relèvent à 70 ou 74 ans.
Le fait est que nous travaillons étonnamment peu au regard de notre longévité. Nous avons une fois calculé combien de jours de notre existence nous consacrions en moyenne au travail rémunéré en Suisse. A votre avis?
Je dirais que nous passons 40% de notre vie au boulot…
C’est l’estimation de la plupart des gens. Or on n’en est qu’à 26% en moyenne. Un universitaire est vingt-cinq ans en formation au début de sa vie, puis vingt-cinq ans à la retraite à la fin de sa vie. Autrement dit, il n’a pas d’activité professionnelle pendant cinquante ans. Ajoutons les week-ends et les vacances et nous arrivons déjà à 65 ans de non-travail.
Dans ce cas, une élévation de l’âge de la retraite serait légitime. Mais pas applicable?
Actuellement, deux tiers des électrices et électeurs ont plus de cinquante ans. Quand la majorité des baby-boomers sera à la retraite, dès 2032, il sera sans doute plus aisé de retarder l’âge de la retraite. Des sondages d’opinion indiquent que celles et ceux qui s’opposaient jusqu’ici à l’augmentation de l’âge de la retraite y sont en majorité favorables plus tard, une fois qu’ils ont eux-mêmes passé 65 ans, afin de sécuriser leur propre rente.
Quelle solution jugez-vous adéquate?
On pourrait indexer l’âge de la retraite à l’espérance de vie, comme le propose l’initiative déposée sur les rentes. Cela résoudrait les problèmes de financement de l’AVS. Sur le long terme, on surfinancerait même un peu l’AVS, ce qui permettrait de mettre en place des mesures sociales en autorisant les personnes qui entrent spécialement tôt sur le marché du travail et qui ont un bas salaire de prendre leur retraite même plus précocement qu’aujourd’hui. L’âge de la retraite est un paramètre essentiel parce qu’il comporte un double effet. Chaque mois de plus où nous travaillons, l’AVS économise financièrement deux mois: un mois de cotisations en plus et un mois de rente à payer en moins.